La rumeur bruissait depuis un certain temps déjà, depuis la fin de l'année 20
13, exactement. Setzer était en studio, à Nashville, et pas n'importe où, en plus ; dans les studios RCA, là où Elvis avait bâti sa légende. Plus l'enregistrement avançait, plus les informations nous parvenant aux oreilles faisait état d'un Setzer en grande forme, revenant à ses (nos?) premières amours, un Rockabilly pur et dur. Mais l'ami Brian ayant plusieurs fers au feu, il prit le temps de faire monter la sauce, partit en tournée au Japon avec son Big Band, avant de revenir dans le Tennessee mettre la touche finale à son nouvel album.
Pendant ce temps-là, le fan eut à se mettre sous la dent (et dans les oreilles, bien sûr) un album d'Imelda May plutôt moyen, surtout connaissant les capacités vocales de l'Irish Teddy Girl, et musicales de son gang mené par son gratteux de mari, Darrel Higham. C'est donc peu dire que l'album de Maitre Setzer était attendu au tournant, surtout vu les pitoyables livraisons effectuées ces dernières années.
C'est donc en pleines vacances que le greffier de Long Island nous envoie une carte postale. Le moment est bien choisi. Il s'est entouré d'une fine équipe : le retour de Mark Winchester à la contrebasse, plus vu depuis l'énorme "Ignition" en 2001, lui qui était du
Brian Setzer Orchestra depuis le 2ème album ("Guitar Slinger" en 1996) ; Noah Levy à la batterie, qui jouait avec lui sur le dernier "Setzer Goes Instru-Mental" et partageait la place avec Slim Jim Phantom sur le Rockabilly Riot Tour de 2011, la méga-tournée mondiale qui aboutit au "Live From The Planet", album live raté par le Maestro alors que c'est bien sur scène qu'il délivre le meilleur de lui-même. Enfin, last but not least, Kevin McKendree au piano, qui accompagne Brian depuis plusieurs années, martyrisant les pianos bastringues et nourri au Jerry Lee survitaminé.
Tout est donc en place, ne reste plus qu'à écrire de bonnes chansons et à bien les jouer. Setzer étant considéré depuis toujours comme un virtuose de la 6-cordes et s'entourant rarement de crêpes, la deuxième partie du programme ne devrait poser aucun problème. C'est plutôt la première partie qui pourrait faire peur, Brian n'ayant plus écrit une bonne chanson depuis... Pfff, au moins! Alors installons-nous dans la banquette, décrispons-nous en ingurgitant un breuvage frais, et écoutons un peu ce que notre vieux pote (34 ans déjà depuis la baffe "Rock This Town", et ça se voit sur la pochette et dans ma glace) va nous raconter.
"Let's Shake!". Le nom sonne bien, mais surtout le morceau sonne bien, comme un bon vieux Jerry Lee, justement. Hey, depuis combien de temps je n'avais pas entendu un morceau comme ça ? Depuis "Sexy & Seventeen", au moins! Qu'est-ce qui lui prend à l'ex-Stray Cat ? Il a oublié qu'il a quitté le groupe depuis plus de 20 ans ou quoi ? En tout cas, ça démarre sur les chapeaux de roues. Suivante : "Rockabilly Blues"! Bon, on peut pas faire plus explicite, ça démarre comme un Mystery
Train, ça continue comme... Du Setzer grand cru! Enorme ! Solo de contrebasse, solo de batterie, tout le monde se régale, dans le studio comme sur la banquette. "Vinyl Records", il parait que c'est sa fille qui lui a donné l'idée de cette chanson, elle qui ne se nourrit que de MP3 alors que Brian vient de découvrir le CD. Il brode donc sur ses vieux disques qu'il fait découvrir à ses gosses, qui, bien entendu, deviennent dingues de Rockab', avec les rouflaquettes qui poussent pour le gamin et les socquettes blanches qui poussent toutes seules pour sa minette. Sauf que, dans la vraie vie, tu te fais pourrir par tes gosses qui voudraient bien écouter Justin "Bridou" Biè-Bière tranquille. Revenons à nos moutons avec "Lemme Slide" qui ressemble un peu à un rebut du
Brian Setzer Orchestra période "The Dirty Boogie". Sympa, un bon Boogie emmené par une contrebasse tout en "Slap" et un piano diabolique. "Nothing Is A Sure Thing" sonne légèrement psycho, un peu dans l'esprit de certains morceaux qu'il a écrit pour le BSO comme "Switchblade 327" ou "Drive Like Lightning". Du tout bon, donc. On continue avec "What's Her Name?", qui, je ne sais pas pourquoi, me fait penser à un morceau qui figure sur l'album "Crazy Times" de
Gene Vincent. Sympa, mais pas la mieux de l'album. "Calamity
Jane" a été inspiré par l'Elvis de "Big Boss
Man", bien sûr, les studios RCA... Setzer nous fait verser dans le mélo ensuite, avec "The Girl With The Blues In Her Eyes", il nous la joue Crooner comme il sait si bien le faire, un peu de Pedal-Steel Guitar pour donner une coloration Country à la chose, on en vient presque à lâcher une petite larme. "Stiletto Cool" est peut-être le seul loupé de l'opus, pas vraiment enthousiasmant. "I Should'A Had A V-8", avec un titre comme ça, on peut s'attendre à un déferlement de Gretsch, un tonnerre de contrebasse... la chanson débute comme dans un campement scout, plutôt bizarre, ça se poursuit avec un solo à la Cliff Gallup, un chant comme le Cochran de "Cut Across, Shorty", surprenant. Et puis vient la perle de l'album, 2'07" de pur bonheur où Brian nous délivre un "Blue Lights, Big City" à mi-chemin entre Buddy Holly pour l'inspiration, les Jordannaires pour les choeurs, Scotty Moore pour la guitare, ce qui fait beaucoup de moitiés, je sais. Et pour finir dans la bonne humeur, "Cock-A-Doodle Don't", une chanson à écouter tous les matins en prenant son p'tit dèj', un pur joyau de Rock.
Depuis très longtemps, je n'avais pas entendu un aussi bon album de
Brian Setzer, le dernier très bon étant un album de reprises ("Rockabilly Riot Vol.1" en 2005), son dernier bon album de compos étant (à mon goût) "Ignition en 2001 ! Là, Setzer nous envoie un uppercut au menton, plus un crochet au foie (moi qui suis si fragile de ce côté-là). Un grand album, enfin, après des années d'errance, ce qui, pour un Stray Cat...
Merci, Monsieur Setzer, vous êtes un Grand, si vous pouviez nous le confirmer un peu plus souvent, notre ravissement serait total, mais vous connaissant comme je vous connais, je vais, dans l'immédiat, me contenter de remettre et remettre encore ce "Rockabilly Riot, All Originals" jusqu'à plus soif.
What Else?
HotRodFrancky
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