On ne présente plus ce groupe emblématique de l'univers pop/rock britannique, ayant connu ses heures de gloire essentiellement dans les années 70 et 80. Suivant des voies différentes, les cofondateurs du groupe, John Lees (guitare)et Les Holroyd (basse), continuent d'ailleurs à travailler chacun sur leur propre projet.
Alors, pourquoi revenir sur un album sorti il y a déjà 35 ans ? Sans doute parce qu'il s'inscrit dans la tradition des albums majeurs du rock progressif des années 80. On peut donc le situer parmi les albums les plus aboutis que l'on puisse connaître : parfaite harmonie du trio Lees/Holroyd/Pritchard, mélodies finement travaillées, paroles délicatement ciselées, brillante technique instrumentale, voix douces et profondes, production d'ensemble parfaitement au point. Ainsi, rien ne manque au tableau, pas même la pochette dont l'artwork nous plonge direct dans une atmosphère fantastique, à l'image d'inquiétants extra-terrestres semblant être venus observer l'activité globale de notre planète. Ce qui ne va pas sans susciter une certaine curiosité quant à leur omniprésence sur ce cover ! Le titre nous rappelle justement que voici venus "The
Eyes of the Universe"!
Ce court opus, huit morceaux seulement, réjouit par son homogénéité et sa solide et majestueuse structure instrumentale. Aussi, l'équilibre entre rock progressif et ballades enchanteresses est parfait. La magie opère à chacun des titres délivrés, qu'ils soient l'œuvre de John Lees ou celle de Les Holroyd, chacun étant l'auteur et l'interprète de la moitié des morceaux de l'album.
On peut différencier deux catégories de morceaux de qualité à peu près égale : d'une part les ballades et slows, d'autre part les titres éminemment pop/rock, le tout s'inscrivant dans une grande homogénéité d'ensemble.
Parmi les titres rock, on relèvera par exemple "
Love on the Line" sur lequel un beau travail de recherche au synthé donne l'impression d'assister à la venue toute en douceur des martiens, du moins au début du morceau. Ensuite, très vite, une rythmique soft, un tantinet heavy, se met en place, celle-ci assurant une splendide progressivité à l'ensemble. Enfin, en complément, la divine guitare d'un John Lees bien inspiré se met à nous délivrer, en filigrane, deux jolis solos. Ceux-ci viennent à point nommé pour donner une atmosphère grandiose à l'ensemble et nous transporter loin, très loin de la Terre! Ce titre, éminemment bien composé et chanté par un Les Holroyd à la voix cristalline, finit en apothéose avec le plus brillant solo de guitare de l'album, lui-même soutenu par les superbes harmonies de fond qu'assurent le trio synthé/basse/batterie. Bref, un monument ! L'enchaînement s'opère rapidement pour découvrir le second titre : "Alright Down Get Boogie". Subtil travail vocal en écho entre John et Les sur un titre un peu plus rock que pop, mais toujours très mélodieux et techniquement sans faille. La voix plus "sucrée" de John contraste merveilleusement avec l'énergie développée par son jeu de guitare quelque peu rageur tout au long de la chanson. Totale réussite, là encore ! On aurait aimé cependant, plus d'allonge sur les plages purement instrumentales, juste pour le plaisir.
Dans la même veine, le quatrième titre, intitulé "
Skin Flicks", composé et interprété par John Lees est un modèle de progressivité. On commence par quelques douces et subtiles notes à la guitare jouées par leur auteur lui-même et on finit par un magique feu d'artifice où guitare et synthé s'unissent pour former un tout furieusement enjoué et harmonieux à souhait. Tout au long du titre, la voix de John s'égraine en douceur et séduit par sa limpidité. On est conquis, une fois de plus ! La deuxième partie de l'album réserve également son lot de belles surprises, côté rock. A l'instar de l'énergique "Sperratus" qui vient jouer les conciliateurs entre parties rock et passages soft. C'est tout l'art de faire cohabiter les paradoxes auquel s'est collé son auteur. L'exercice de style est brillamment réussi. Chapeau bas, Sir John! C'est peut-être le titre le moins évident, mais pas le moins inspiré. Un autre encore de ce calibre aurait pu encore davantage nous combler.
De leur côté, les ballades ne sont pas en reste non plus ! Après une solide introduction rock, l'oreille un poil avivée découvre alors une ballade des plus romantiques comme bien peux ont la capacité d'en créer : "The Song (They
Love to Sing)". Rapidement, on est littéralement envoûté par la mélodie, sublimée d'ailleurs par l'énorme travail vocal et d'écriture de son auteur. On peut alors observer un chant à la tonalité claire et puissante à la fois. Couplets et refrains s'enchaînent et fascinent alors, à l'image des harmonies et des parties instrumentales qui, ici encore, impressionnent. On comprend que l'on tient là une pièce maîtresse de l'album. Un rêve, en somme ! Les trois derniers titres viennent rejoindre ce morceau de par leur nature soft. Par exemple, "Rock'n'Roll Lady", composé et interprété par Les Holroyd, est une ballade aux harmonies subtiles, aux enchaînements précis et au jeu de guitare qui, une nouvelle fois, joue magistralement dans le registre de la progressivité. Sans que l'on s'y attende, on touche à la perfection tout le long, notamment au solo de fin où l'on ne résiste pas longtemps à l'appel des sirènes !
Rajoutons à ces deux titres l'avant-dernier morceau intitulé "Capricorn". Celui-ci nous plonge dans une étrange atmosphère, empreinte de mysticisme, mélancolique et envoûtante à la fois. Au chant, les délicates notes délivrées par un John Lees au sommet de son art subjuguent par leur profondeur. L'enchaînement "soft" est assuré avec le dernier titre. En guise de conclusion, on y trouve une pépite : "Play to the World". Il s'agit d'une splendide ballade, aux arpèges uniques en leur genre, magnifiquement déployées et livrées sur un plateau rock en or. On y retrouve la fine plume et les talents vocaux et instrumentaux d'un Les Holroyd en véritable seigneur dans son domaine de prédilection. Bref, un maestro en habit de lumière ! Il nous fait immanquablement rêver tout au long du morceau par sa voix au timbre sensible et si particulier. Le fantastique travail de cohésion instrumentale apparu jusqu'alors atteint ici son apogée, du moins durant quelques courtes mais savoureuses minutes, en fin de morceau. Nul doute, on tutoie ici les étoiles !
Ainsi, l'album finit par nous convaincre de l'immensité du travail réalisé par deux génies incontestés du rock progressif. Du grand, du très grand BJH.
Un bémol tout de même : l'album aurait pu encore inclure d'autres titres, de même qualité, dans la lignée d'un "XII" ou "
Gone to Earth", histoire de renouer avec la tradition ! Trop court, trop vite digéré, on reste donc un peu sur sa faim ! C'est sans doute le prix à payer pour s'attribuer les meilleurs services de nos deux illustres compères !
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