Partager quelques bières dans un bar de la République Tchèque peut amener des promesses en l'air qui rencontrent un jour le Destin. C'est ce qui est arrivé au guitariste chanteur Alex Diaz (The Prestige) et au batteur Aurélien Bignon (Last Exit To Brooklyn), qui se sont retrouvés quelques temps plus tard, pour explorer ensemble des territoires plus rock qu'il ne pouvaient visiter avec leurs groupes de hardcore respectifs. Ils ont commencé à répéter en duo, puis en trio avec Maxime à la basse ; celui-ci a quitté le groupe après leur premier Single "Tape Worms", pour être remplacé par Pierre Thureau (As we Draw).
Si
New Favourite a nommé son style "Lowtuned Rock", au lieu de heavy rock par exemple, ce n'est pas juste pour la posture : leur particularité sonore réside dans un choix d'accordage peu commun, avec la première corde de la guitare descendue d'une octave entière, ce qui rend leur musique bien plus lourde. Evidemment, en conséquence la basse tape plus dans les médiums pour éviter que les fréquences ne se bouffent le nez. L'autre singularité réside dans le fait que les trois musiciens savent chanter et prennent le micro (même le batteur !), Alex Diaz restant le lead singer.
"
Chasing Light" est déjà leur deuxième EP, après un premier effort sobrement nommé "
New Favourite" sorti début 2020, qui avait été un sacré coup d'essai, à mi-chemin entre rock lourd et post hardcore, avec des bribes de stoner : imaginez
The Hives ou
The Cult qui croiseraient Quicksand et
Refused.
La pandémie a évidemment torpillé la tournée qui devait suivre, mais le groupe ayant prévu d'enregistrer un nouvel EP, ils s'attelèrent à cinq nouveaux morceaux, en prenant tout leur temps, aidés par le producteur Amaury Sauvé.
Une chose est vite entendue quand on découvre le disque, c'est que ces mecs savent pondre des plans accrocheurs. On rentre dans le vif du sujet, avec des riffs rock groovy à souhait, simples, directs. Le rock ultra plombé de New Favorite me redonnait des frissons sur lesquels j'avais du mal à mettre un nom : les compatriotes de Lazy et leur unique et lourdissime album "Rock Against Rock" (2006), qui étaient repartis dans les limbes aussi vite qu'ils en avaient déboulé.
On est loin de rester calé sur une routine plan-plan, le tempo se fait parfois enjoué (le début de "Godspeed"), et tantôt le groupe se permet d'appuyer un peu plus sur le champignon ("Bad Milk", "Demon"). On joue sur le rythme avec des ralentissements heavy bien amenés, souvent en fin de morceau. NWFV peut se faire plus attentiste, sur "Fire, Sweet Fire", comme un cowboy attendant un duel dans une rue poussiéreuse, avec un coté 60's, 70's, presque stoner, qui me rappelle les excellents Patrón. On peut même tomber sur des notes frénétiques de piano rock n' roll, ou se faire chatouiller les oreilles par quelques accords malicieusement slidés.
Le rock du trio est fait pour la scène, avec sûrement l'objectif de faire hocher les têtes sans perdre de temps. Les compos sont tournées vers l'efficacité, dans une énergie rock, avec des basses pulsantes et des guitares bien remplies. En parlant de la basse, elle est bien présente dans le son mais un poil discrète dans les notes, saufs à certains endroits stratégiques où elle participe aux montées de pression ("Demon"). La guitare est la reine sur ce disque, dans toute la largeur de l'espace sonore. La production d'Amaury Sauvé est profonde, limpide et dynamique, et je n'ai pas parlé du son de batterie, assez impérial.
Une chose est sûre, avec cet EP,
New Favourite montre qu'il sait faire un rock où il n'y rien à jeter, avec suffisamment de simplicité pour que leur musique s'assimile et passe dans le sang dès qu'elle a franchi le fond des oreilles. Cependant, puisque rien dans ce monde n'est parfait, je pourrais objecter que par rapport à son ébouriffant premier disque, il a franchement recentré sa musique autour du rock, et a pas mal raboté tout ce qui dépassait. Il en perd un peu en relief et en saveur à mon humble goût ; au petit jeu du cul entre deux chaises, il a choisi son assise ! Il n'empêche qu'avec deux EPs aussi réussis, je ne peux m'empêcher de regarder vers un hypothétique premier long format, en me demandant quelle direction ils pourraient bien prendre. Etant un indécrottable adepte des mélanges bien épicés, j'avoue espérer qu'ils reviendront vers de plus belliqueuses intentions, mais le tournant rock est-il déjà bien pris ?
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