La première moitié des années 90 apparait comme une période quelque peu délicate pour le quintette australien. Les Oils sont beaucoup moins prolifiques, espaçant leurs livraisons studio d’un minimum de trois ans. Seraient–ils en manque d’inspiration ? Auraient-ils perdu la spontanéité de leurs jeunes années ? De plus, on sent qu’ils n’arrivent pas à nous pondre un nouvel album de la trempe de «
Diesel and Dust ». Seraient-ils montés trop haut et se seraient-ils brûlés les ailes ? Malheureusement, du moins pour ma part, le groupe alterne entre le décevant et le moins bon, le tout cependant, entrecoupé, il faut le reconnaitre, d’un live extraordinaire et explosif.
Alors dans tout cela et après toutes ces interrogations, qu’attendre, en cette année 1996, de
Midnight Oil ?
La réponse nous est donnée par le déroutant «
Breathe ». Déroutant de prime abord notamment, il eut été étonnant que nos cinq musiciens ne nous gratifient pas d’un ou deux petits contre pieds comme ils en ont le secret. Avec cette pochette qui renoue avec le fond noir des premiers albums et ce poisson des abysses gueule grande ouverte, toutes dents dehors, on se dit que ça va être la déflagration rock ultime. De même l’intro du premier titre, «
Underwater » avec sa grosse ligne de basse bien nerveuse et bien rugueuse pouvait laisser augurer d’une bonne décharge d’énergie.
Et ben non !!! Il n’en sera pas ainsi.
En effet, le groupe privilégie une approche plus apaisée voire même pour certains titres une ambiance quasi intimiste avec des arrangements subtils. C’est pratiquement l’album le plus calme de la discographie.
La cause est due à la tonalité assez folk de nombreuses compos où l’acoustique prend le pas sur l’électricité. Ainsi dans cette veine, on pourra se pencher sur l’excellent et décontracté « E-Beat » mais également sur l’une des perles de l’album à savoir « Barest Degrees » qui oscille entre gaité et mélancolie dans une ambiance au coin du feu des plus évocatrices.
Bien évidemment, nos cinq australiens ne se limitent pas uniquement à cela et nous proposent également un rock austère et introspectif (du moins c’est l’impression que cela me laisse) aux tempos lents et aux puissantes guitares avec les très bons « Common Ground », « Star of Hope » et « Sins of Omission ». Ce dernier titre avait fait, d’ailleurs, l’objet à l’époque d’un passage en Live à Nulle Part Ailleurs. Une prestation de qualité tout en puissance maitrisée.
Dans la continuité de cette ambiance sombre, « In the Rain » est plus poignant que jamais ; une mélodie superbement triste pour un morceau d’une noirceur peu commune.
Enfin, on est ramené aux premiers amours surf music que l’on avait pu entendre dans les premiers albums avec l’instrumental « Gravelrash » dans la parfaite lignée de « Wedding
Cake Island » présent sur «
Bird Noises ».
Curieusement et bien que l’on puisse être frustré de ne pas retrouver la légendaire énergie du groupe, on se surprend à bien apprécier cet ensemble de titres plutôt bons voire même très bons. Toutefois, le groupe est encore quelque peu convalescent et nous fait des petites rechutes par-ci par-là en nous ressortant ses fameux plans "gentillounets" avec le quelconque et fade « Surf’s up Tonight », les candides et dispensables « One Too Many Times » et « Home ». Il en va de même pour le seul morceau énergique et qui accélère le tempo, « Bring on the Change » est assez faible et n’est mélodiquement pas très accrocheur. C’est bien le comble encore une fois qu’ils soient plus foutus de composer ce genre de titre. Dommage.
Alors, même si nos cinq australiens ont encore du mal à tenir la distance sur l’ensemble d’un album et si
Breathe n’est pas le meilleur album qu’ils nous aient concoctés, il a en revanche le mérite de leur permettre de relever la tête après un faible « Earth and Sund and Moon ». Le groupe retrouve d’une part un sens de la mélodie qui sait se faire simple mais diablement efficace sur certains morceaux à tendance folk et d’autre part une certaine puissance et consistance sur d’autres. Des éléments qui avaient manqué sur les deux précédentes livraisons. Cet album mérite que l'on s'y attarde et qui, au final, se révèle assez agréable à écouter. Cela peut nous laisser espérer à terme un grand retour des Oils.
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