C’est 16 ans après le tribal «
Spiritchaser » que les
Dead Can Dance nous reviennent avec «
Anastasis ». Un titre ô combien symbolique, l’
Anastasis désignant la résurrection du christ. Et quelle renaissance pour ces véritables dieux du mouvement dark-wave !
D’entrée, « Children of the Sun » nous prend et on décolle dès les premières notes de clavier. Nous sommes en terrain connu, et on comprend tout de suite avec l’omniprésence du synthé que le groupe n’a pas choisi de continuer l’orientation acoustique de l’excellent «
Spiritchaser ». L’aura mystique du dernier
Dead Can Dance trouve de nouveau sa source dans cet incroyable mélange de nappes de synthé, de percussions, d’arpèges et bien sûr du chant hypnotique de ses deux immenses chanteurs que sont
Lisa Gerrard et
Brendan Perry. C’est B. Perry qui ouvre donc sur un morceau typique DCD avec rythmique de batterie, finale aux arpèges sur lequel L. Gerrard appose ses back vocals, un single potentiel. Dès le morceaux suivant, la cantatrice dévoile un univers aux sonorités arabisantes, aspect qui sera développé tout au long de l’album, rappelant l’époque «
Into the Labyrinth ». On retrouve notamment ces mélodies et rythmes orientaux sur « Agape » et ses violons, tout comme sur le mystique « Kiko » et ses sonorités de sitar.
Mais si «
Anastasis » fait la part belle aux sonorités byzantines, il est loin d être une copie d’ «
Into the Labyrinth ». Sa force est de faire cohabiter différentes époques musicales du groupe. On retrouve sur par exemple « Amnesia » (le single), une lointaine parenté de l’époque «
Spleen and Ideal », avec sa rythmique basse batterie très rock et son univers mélancolique. Le morceau est judicieusement ponctué de cuivres, accentuant la gravité de l’ensemble. De même, avec son entame à la cornemuse, ses roulements de tambours, le morceau « Return of the She-king » rappel immanquablement l’aspect médiéval/baroque développé sur «
Aion ».
Contrairement à leurs précédentes réalisations, on ne trouve aucun interlude instrumental dans cet album. Les titres, qui font entre 6 et 8 minutes, s’enchaînent et se développent pourtant à grande vitesse, tellement ce «
Anastasis » vous tient par la qualité de ses compos. Déboule bientôt « Opium », avec un
Brendan Perry au timbre toujours aussi fascinant, le morceau s’achevant par une superposition d’instruments à cordes, des cuivres soutenus par du djembe, des nappes de synthé et la voix planante de
Lisa Gerrard, un must. Toutefois, le calme épilogue « All in Good Time » clôture ce 8ème chapitre sans le transcender, un morceau dispensable à mon sens.
Après quelques écoutes arrive le temps du bilan. Comme à chaque chef-d’œuvre ses imperfections, on peut trouver à «
Anastasis » une direction très linéaire. En effet, la structure des titres est calibrée selon un seul et même modèle. L’homogénéité de l’album fait parfois regretter la diversité des compos des albums précédents «
Into the Labyrinth », « The Serpent’s
Egg », «
Dead Can Dance », où l’on pouvait entendre des interludes instrumentaux, des morceaux a capella de L. Gerrard et l’apparition de morceaux ou de sonorités atypiques qui portaient vers de nouveaux horizons l’incroyable univers musical du groupe (le surprenant « Saltarello » de l'album «
Aion » par exemple).
Ce «
Anastasis » est donc plus l’album de la maîtrise que celui du changement. On ne blâmera cependant pas le groupe (fondé en 1981) de rester dans le giron de ses propres créations ! Si la sortie de « Ark », dernier album solo de Perry sorti en 2010, nous avait fait rêver d’une reformation de
Dead Can Dance, rien ne laissait entrevoir un retour si réussi. Là où « Ark » nous avait quelque peu laissés dans l’expectative, semblant clairement refléter la réalisation d’un homme doué mais seul, «
Anastasis » comble toutes nos attentes. Accessible, sa musique induit une véritable vague de plénitude, et ce dès les premiers instants : comme un soulèvement immédiat de l’esprit vers une dimension de sérénité où se côtoient rythmes envoûtants et mélodies jubilatoires. Une formidable résurrection.
Comme tu le remarques judicieusement, on retrouve en effet dans cet album tous les éléments qui ont élevé DCD au rang de légende. Il y a même un peu de la coldwave des tous débuts qui pointe le bout de son nez sur "Opium", étonnant !
Pour autant, ils ne se sont pas contentés de proposer une simple resucée du passé, cet album ayant bel et bien sa propre personnalité. Là où ils ont perdu en diversité (comme tu le pointes justement), ils ont gagné en cohérence d'ensemble, un fil rouge semblant lier tous les morceaux. Il me faudra encore quelques écoutes pour poser des mots plus précis sur le ressenti.
On sent que les compos ont été soignées, la plupart évoluant constamment avec l'apport de nouveaux thèmes et de nouvelles sonorités, tout en gardant cette impression de "couler de source".
Franchement, ils ont bien soigné leur retour. Et une chose est sûre, c'est qu'ils n'ont rien perdu de leur inspiration ni de leur magie.
Enfin, malgré l'utilisation massive de synthés, j'ai eu la bonne surprise de constater un rendu plus chaud et organique que le dernier album de B. Perry.
Bravo à eux et encore merci pour ta chronique.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire