Il existe (parait-il) un petit pays non loin de celui des Français qui se nomme la "Soannie", ce pays est constitué d'une légion de fans : les "soanniens" des adorateurs prêts à tout pour soutenir leur "dieu", leur "idole", celui qui les préserve de la malfaisante variété à deux balles qui rode non loin de leur territoire, et les berce d'une douce poésie influencée aussi bien par les grands maîtres de la chanson Française (Brel, Piaf,...) que par le(s) meilleur(s) groupe(s) de rock Français (par exemple : Noir Desir...).
Une fois ce tableau à l'allure fantastique (mais dépourvu de champignons et de petits êtres bleus encore que...) dressé, il convient de s'interroger sur les origines du personnage
Soan devenu maître de tout un peuple, et plus simplement pour parler en termes concrets et moins sectaires : d'un artiste/musicien/authentique/pas trop plébiscité/mais qui s'en bas les castagnettes tant qu'il vit de la musique qu'il aime.
Soan, d'un point de vue extérieur jusqu'en 2009 était perçu comme un clochard comme on en voit tous les jours dans le métro... mais avant tout musicien non? Oui certes...mais comment faire pour que les gens le remarquent, lui permettent de faire carrière et éventuellement le respectent en tant qu'artiste? Réponse que tout le monde connait : La nouvelle star! Apprécié pour son originalité et la qualité peu commune et époustouflante de ses prestations scéniques et vocales habitées... puis injustement dénigré avant et surtout après sa victoire largement évidente et méritée à cause d'un comportement "rebelle" qui consiste à vouloir se reposer un petit peu plutôt que d'aller faire des interviews à tout va avec des braves gens qui le méprisent de toute façon, notre rebelle/fatigué va sortir son premier album officiel avec "Sony" dans la foulée...quelques petits mois après! Un record pour un gagnant de cette émission! Il faut dire que l'album en lui-même était déjà "écrit" ou presque avant même que
Soan participe à l'émission. Du coup sa victoire était le "coup de pouce" attendu pour lui permettre de mener à bien son projet,
Soan est alors décrit comme rebelle, fatigué, et machiavélique!
L'album qui nous intéresse ici est génialement intitulé : "
...Tant Pis", non seulement cela renvoie aux origines punk du chanteur une fois le titre traduit en anglais ("Nervermind" de
Nirvana, ou en encore "Nervemind The Bollocks" des
Sex Pistols) mais ça constitue aussi un doigt d'honneur immense aux détracteurs : "Vous en vouliez pas hein??? bah "tant pis" le voilà mon cd et bim!". Malgré un titre d'album qui semble plus inspiré d'un contexte actuel, les textes et la musique qu'il contient semblent en revanche provenir tout droit du vécu de l'individu ce qui est d'autant plus fascinant. A commencer par le morceau d'ouverture globalement assez énergique et plein d'urgence : "Next Time", dont le rythme semble se calquer sur une cavalcade en pleine ville, et dont la musicalité semble posséder un lien familial évident (et louable) avec celle du groupe des "Têtes Raides" (que
Soan adore par ailleurs). Les paroles quant-à elles prennent une ampleur autobiographique poétique sur ce qui définit le choix du mode de vie "rebelle" en marge de la société de notre
Soan : "et depuis je me suis fait marginal, je me laisse pousser des rêves et je cours après les étoiles quitte à me faire mal". Il évoque son mal de vivre occasionnel de façon violente et imagée "si la vie est une pute alors pourquoi j'me sens si seul?", mais aussi son passé où il se sentait incompris par ses parents : "mais putain, quand est-ce que tu me dis que t'es fier de ton sale cabochard de mioche ou t'attend qu'on l'enterre quitte à te faire taire?",
Soan est alors rebelle, fatigué, machiavélique, et en manque d'amour!
D'ailleurs en parlant d'amour, c'est bien souvent le thème majeur abordé tout au long de l'album, abordé parfois de façon métaphorique et "céleste" sur l'excellent morceau "séquelles" où des cuivres (des trombones) sont de la partie, il y parle "d'éclipses accrochées à l'autel" des quatre volontés d'une fille probablement chanceuse va savoir! L'amour est abordé de toutes les façons possibles et imaginables : il y a l'amour jaloux qui réclame le retour de la bien aimée dans le superbe et classieux : "Putain de Ballerine", où
Soan entouré d'orchestrations romantiques (sa guitare acoustique, et l'on croit entendre des violons...), réussit le tour de force de faire sonner le mot "putain" comme un magnifique compliment auprès de sa ballerine. Il y a l'amour du pays et la lutte pour celui-ci où
Soan n'aura probablement jamais autant sonné comme son idole Jacques Brel : "Puisque Rien", l'amour glauque et sadique dans une veine bien plus rock que sur le reste de l'album : "Parisiennes", l'amour du peuple sur "Pas pour Lui" où
Soan se montre assez direct et concret dans ses promesses pour être élu. Et puis il y a "Emily" un des meilleurs morceaux de l'album très épuré où la voix tantôt grave, tantôt éraillée, mais toujours mélodieuse de
Soan sonne comme une complainte, c'est de l'amour impossible et frustrant dont il est question ici, celui dont de nombreuses personnes sont souvent victimes malheureusement... (snif!). Et puis il y a aussi deux morceaux chantés en anglais : "The Storm" et "Monster" où
Soan semble grandement s'inspirer du style de
Bob Dylan tant au niveau de l'intonation de la voix que du minimalisme qu'offre la guitare acoustique, ces deux morceaux sont un régal par ailleurs même si ils sont les moins représentatifs du style élaboré sur le reste du disque.
D'une façon générale le premier effort de
Soan se veut très personnel au niveau du style de l'écriture, même si son style parfois abstrait et imagé n'est pas sans rappeler parfois celui d'un Bertrand Cantat, il a tout de même le mérite de lui apporter des petites touches d'originalité et de modernité, notamment en jouant sur le décalage entre la prose poétique et le langage familier de la rue que l'on peut retrouver au sein de mêmes textes (Next Time, Séquelles, Putain de Ballerine, Emily...). Sa voix quant à elle est plaisante du début à la fin et met même le frisson sur les chœurs clôturant le dernier morceau de l'album "Belleville". On constate également que la musique en elle même est assez minimaliste et épurée (les instruments sont peu nombreux et parfois en retrait), ce qui dénote d'un certain parti prix artistique s'encrant dans une volonté de "laisser respirer" les textes, afin que eux seuls parlent d'eux-mêmes.
Soan avec cet album s'inscrit donc dans la continuité des chanteurs à texte français. Dommage néanmoins que la réputation dont
Soan "bénéficie", n'ait pas aidé l'album a rencontrer le succès massif qu'il aurait mérité, la faute notamment à une promotion assez peu poussée de la part de son auteur...
Soan est alors rebelle, fatigué, machiavélique, en manque d'amour, et auto-destructeur! Et s'il était tout simplement un de ces artistes discrets ne cherchant pas la musique pour la gloire, mais simplement la musique pour elle même ? Il est fort probable que cela soit son cas, tout comme le fait que
Soan soit ce qu'il convient de nommer un artiste authentique à part entière bien parti pour redonner à la chanson française ses lettres de noblesses,
Soan mérite donc bien une reconnaissance artistique, et musicale autre que celle qu'on lui accorde pour le moment, il ne tient qu'à vous d'écouter ce que l'artiste a à vous proposer dans ses deux premiers disques déjà populaires auprès de ceux qui ont bien voulu lui tendre l'oreille...sinon "tant pis!"
Au delà de cet artiste que je n'avais pas plus apprécié que ça lorsqu'il m'était arrivé de tomber sur l'une de ses prestations TV, je tenais simplement ici à vous manifester tout le plaisir que vous m'aurez procuré en vous lisant.
Quelle jolie plume, et quelle belle culture musicale vous avez déjà pour quelqu'un qui n'a même pas encore 20 ans ! Chapeau et bravo !
Autre chose: A l'heure ou la plus part de vos contemporains se torchent désormais avec ce qui revêt encore (en tout cas pour quelqu'un comme moi) quelque chose de l'ordre du sacré, à savoir l'achat physique d'un DISQUE, permettez moi donc de vous dire également ici à quel point cela me rend heureux de voir que vous achetez la musique de ceux qui la créer.
Pour finir, je me demande encore comment, quelqu'un de la génération qui est la votre(celle du consommable/téléchargable/jetable) s'intéresse, se cultive et aime autant de groupes de ma propre génération (j'ai 45 balais) ?
De Depeche Mode en passant par Judas Priest... Vraiment vous m'aurez bluffé jusqu'au bout.
Continuez !
Bien à vous.
Il faut se rendre à l'évidence que l'objet disque intéresse de moins en moins (long débat).
Il n'empêche... Se retrancher derrière le fait qu'un album serait trop cher de nos jours, c'est vraiment se foutre du monde. Un paquet de clop c'est combien aujourd'hui ?
Et puis entre les prix réduits, les soldes à tout va, les promos à gogo, et le prix ou on trouve désormais n'importe quel disque (récent ou plus ancien) sur les plateformes marchandes du net... Non décidemment faut pas nous prendre pour des c**s.
Je pense que les mélomanes que nous sommes trouveront toujours, même demain, le moyen d'acheter et d'écouter sur support CD et/ou vinyl.
D'ailleurs à ce sujet, qui aurait parié sur le retour de ce bon vieux vinyl (33T) dans les bacs des disquaires ? Pas moi... Et pourtant.
Certes, son prix est encore important, mais qui sait, il se pourrait bien qu'il redevienne attractif pour les vrais passionnés de "good vibrations".
Au fait, je n'ai pas eu ma réponse. Ce goût pour la diversité, cette passion pour les anciennes formations, ça te vient d'ou ?
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