Chroniquer un album tel que celui ci est un paradoxe : la musique d'
Izia est avant tout un dialogue avec nos émotions, sa musique ne se rationalise pas, mais demande à celui qui l'écoute d'abattre certains murs intérieurs faits de bienséance, de retenue et de self control. Comme elle l'affirme elle-même, sa musique est un « retour aux origines du rock », une musique faite comme pour nous permettre d'exprimer des sentiments en temps normal réprimés. En se dégageant, ils nous font danser de toutes nos forces, fermer les yeux et apprécier cette musique simple, mais qui nous parle tellement. Mais il s'agit tout d'abord d'évoquer le passé de cette jeune chanteuse, qui a, dans ses débuts, joué en première partie d'
Iggy Pop. Je ne rentrerai pas dans le débat des « fils et filles de », car bien qu'elle soit la fille du célèbre Jacques Higelin, sa réputation se fonde sur une expérience de la scène et des années de tournée partout en France et non sur un quelconque réseau de relations médiatiques.
Izia vient donc cependant d'une famille d'artistes, avec une mère danseuse et un père chanteur et a grandit dans cet univers. Elle s'est cependant créé un univers bien à elle, refusant de chanter en français pour l'instant et privilégiant sur cet album la voie du rock brut et sauvage.
Cette création porte en effet la marque des grands classiques du rock comme les Stones, et le reste du rock anglais des années 70. Cependant, plus que des accents mélodiques, le chant de
Patti Smith et l'énergie de certaines chanteuses punk transparaissent dans sa musique. Les accents Jopliniens qu'on lui attribue souvent viennent des influences de son guitariste, Sébastien Hoog, dont le jeu se rapproche du folk des années 60/70. Ce mélange hétérogène forme un album surprenant et même parfois difficile d'accès à la première écoute, car très singulier. Du rock comme on en fait plus, un retour à des racines peut-être perdues de vue par un rock aujourd'hui disparate et parfois enfermé dans une carcan de clichés sur ce que doit être un rockeur en 2012. À tel point que son statut de femme a pu en rebuter certains, peu habitués à entendre autre chose que des chants féminins lents et mélancoliques.
Izia arrive et bouscule tous les préjugés pour s'imposer comme une véritable artiste.
Cet album éponyme est son premier sorti, fruit notamment de sa grande collaboration avec Sebastien Hoog, seul membre du groupe à être présent depuis sa formation. Il s'ouvre avec la chanson « Back in Town », qui donne le ton de l'album et dont le titre même indique une arrivée remarquée et imposante. Le mouvement est lancé et les titres « Lola » et « The
Train » se placent dans sa continuité, avec des rythmes très marqués qui s'accordent parfaitement avec le titre du troisième morceau. « Hey Bitch » marque une rupture, il nous interpelle et nous rappelle qu'
Izia fait du bon rock, mais exprime aussi des émotions brutes et sans complexes. Il forme un duo avec « Let Me Alone » qui est sorti en single par la suite et qui constitue pour moi le paroxysme de cet album. Le début plutôt posé nous surprend et attise notre curiosité. Petit à petit le rythme se fait plus pressant et enfin la musique éclate, la guitare est saturée et on a le sentiment que toutes les barrières sont tombées pour ne laisser que de l'expression pure. Dans la suite de l'album, une nouvelle dimension est apparue, les intros se font plus appliquées, la mélodie est plus travaillée. « Blind » et « Burning » nous amènent vers « Life Is Going Down ». « Quelqu'un a changé le disque ? » aurait-on pu entendre il y a quelques années. Les accents de calme et de mélodie qui transparaissaient dans les deux titres précédents sont ici poussés à la limite de la mélancolie : la guitare commence seule par des arpèges lents, ensuite rejoint par la voix lente et grave d'
Izia, ce qui forme une mélodie noire et envoutante. On retrouve cependant bien vite le rythme rapide et l'énergie caractéristique de cette chanteuse à part entière et le début de la chanson apparaît alors comme un rêve perdu au milieu de cet album. Mais ce moment irréel laisse des marques sur les deux morceaux suivants qui sont beaucoup moins sombres, mais portes néanmoins des relents de la digression passée. « Disco Ball » est un nouvel ovni dans cet univers déjà très bigarré : que vient faire le disco dans cet album ? Sous ses airs de chanson dansante et simpliste, il s'agit en fait d'un nouvelle expérience qui est mise en valeur par la rupture qu'elle présente avec les mélodies qui l'entourent. Enfin l'album se clôture avec « Sugar Cane ». On se serait attendu à une explosion de voix, de guitare saturée et de batterie folle pour clôturer cet album comme il avait commencé mais là encore
Izia nous surprend. « Sugar Cane » ressemble à une complainte, pleine de douleur et de mélancolie, preuve de l'ambivalence qui fait la personnalité de cet album. Une unité donc faite de contrastes et de multitude, c'est ce qui rend cette création intéressante et riche.
Cependant, je tiens à signaler qu'
Izia est une artiste qu'il faut voir en live. Son album prend une autre dimension quand on voit de quoi elle est capable sur scène. Il semble vivant et porteur d'une réelle personnalité, bien différent du rock aseptisé à grand succès. C'est un véritable spectacle qui donne son sens à ce disque et lui confère le statut de quasi manifeste de sa philosophie : profiter de la vie en se donnant à fond. «
Izia » nous rappelle que ce sont les émotions qui sont fondamentales en musique. Elle remet en question notre univers policé et sage par l'énergie qui s'en dégage et qui nous pousse à un peu plus ressentir les choses, dans un monde où l'intellectuel prime souvent. Merci
Izia pour cet album.
« KEEP ON ROCKING »
Well done!
Pour l'avoir vu une fois en festoch ça depote pas mal...
Mais bon, ça reste du rock de bobo...
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