De sa voix posée autant que chargée d’une émotion qu’elle sait doser, donner au bon moment,
Patti Smith entame avec « One Voice » une promenade pleine de mystère, qui mobilise tout le groupe. D’un son moins entier, plus axé sur la mise en avant d’un chant assez monocorde dans l’ensemble, où les mélodies asiatiques apparaissent aussi sous un jour plus explicite, « Lo and Beeholden » vaut surtout par l’intensité du refrain et de la conclusion. « Boy Cried Wolf » démontre une expressivité vocale, soulignée par la guitare électrique, où l’on décèle encore l’influence que
Kate Bush a pu avoir sur la chanteuse, à force d’élans passionnés délivrés par à-coups. Les « I don’t care » finissent par sonner punk. Plus rythmé, plus électrique, « Persuasion » marque un temps fort au bon moment, avec solo de guitare, accélérations et pics d’intensité. Bien entraînant lui aussi, « Gone Pie » se souvient davantage de la new
Wave, importance du clavier oblige, mais la guitare électrique y garde toute sa place.
Fallait-il vraiment marquer la pause plus sentimentale de « China Bird » ? La mélodie, asiatique en demi-teinte, embellie par des arpèges de guitare acoustique placés avec délicatesse, permet au chant de passer lentement du murmure au cri, sans exagérer dans un sens ni dans l’autre. Puis la guitare électrique revient aux abords de la quatrième minute. Face à une telle maîtrise, on ne peut que s’incliner. Du coup, le son primaire de «
Glitter in Their Eyes » fait son apparition avec d’autant plus d’éclat, jusqu’au hard rock, ce qui dénote une intelligence de la dynamique par les contrastes, au sein d’un album, que l’on ne rencontre que chez les plus grands.
La ballade sombre, entre narration et description, de « Strange Messengers », insiste sur l’esprit de synthèse, avec une force de caractère qui, reconnaissons-le, tient la durée des huit minutes, qualité qui n’est pas non plus donnée à tout le monde. La voix de
Patti Smith y opère des transformations qui, parfois, la rendent digne de la prestation d’une métalleuse au meilleur de sa forme. Par la constance de ses accents folk, « Grateful » nous berce et nous emporte loin. Proche du metal, « Upright Come » montre que les saveurs puissantes n’ont pas dit leur dernier mot. La fin de l’album, au contraire, aurait-elle le bonheur de se corser encore plus ? « New Party », très metal lui aussi, semble le vouloir. Du coup, « Libbie’s Song », plus folklorique, arrive à s’intégrer. Quant au final «
Gung Ho », du haut de ses onze minutes, il reste du grand art.
C’est donc avec un très bon album, produit par Gil Norton (Pixies,
Foo Fighters), et comptant Michael Stipe de
REM parmi ses invités, que
Patti Smith inaugure les années 2000. Une belle occasion de se replonger dans sa discographie et de redécouvrir ses albums plus anciens.
D. H. T.
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