Le public avait réservé un bon accueil au grand retour de «
Whitesnake » avec son «
Good to Be Bad » en 2008, rappelant que la formation était toujours dans la course. Depuis, le serpent blanc, comme à ses grandes habitudes, a pris le temps de muer. Durant l’année 2010, le groupe se sépare de son bassiste Uriah Duffy et de son batteur
Chris Frazier, pour les remplacer par Michael Devin (ex-
Lynch Mob) et Brian Tichy (ex-
Billy Idol). Tout juste après ce renouvellement, Timothy Drury prendra la décision de quitter la formation pour s’atteler à son projet solo. Ce dernier fera malgré tout office de présence sur la dernière création en 2011, «
Forevermore ». Effectivement les claviers de Timothy seront là cette fois en tant que guest. Autre invité, beaucoup plus symbolique pour David Coverdale, la présence très éphémère de son fils Jasper Coverdale au chant. Un chant que l’on ne parviendra à percevoir ou à peine. Seule sa simple présence semble avoir compter aux yeux de David. Un David dont on sent indéniablement le poids des années, imprégné sur son visage qui autrefois avait su charmer les foules féminines, mais également et bien malheureusement, sur sa voix. Une vieillesse que l’on percevra aussi distinctement sur le clip de «
Love Will Set You Free » que sur l’album présent dont il est issu. Un album à la couverture magnifique qui sera rappeler son précédent. Mais souvenez vous tout ce qui est en métal jauni n’est pas forcément de l’or.
De quoi il est question, cette fois? Comme à chaque fois avec David Coverdale. De l’amour, de l’amour, de l’amour. Mais de l’amour à l’américaine. Peut être plus encore avec celui là. La lumière d’un soleil aride nous attaque directement d’entrée sur « Steal Your
Heart Away ». Ici, les guitares de Doug Aldrich et Reb Beach, complétées par l‘harmonica, vibrent avec tonicité, délivrant un son southern efficace et stimulant. La voix de David Coverdale y est toujours aussi chaleureuse, mais manquerait de sa magie. On la sentirait quelque peu fatiguée sur le refrain, sans que cela ne devienne gênant. Du tout. Ce sont les guitares qui seront véritablement dans le feu de l’action, comme tend à le démontrer « All Out of Luck », à grands renforts de riffs psychédéliques. Le jeu est ici plus monstrueux encore. Le son bien saturé, les élans sont tourmentés et harmonieux. On montre les muscles, c’est la force qui prévaut. Coverdale de sa voix sensuelle va s’engouffrer dans ce milieu ardent. Celui-ci paraîtra néanmoins quelque peu couvert par les ébats rageurs des guitares.
Les guitares tiendront véritablement le haut du pavé. Ce sera aussi ce penchant vers le rock sudiste qui imprégnera une bonne partie des titres de l’album, comme on le constatera nettement sur « I Need You (Shine a Light) » ou sur «
Whipping Boy Blues ». Ces titres souffriront de la présence d’un chant qui aura perdu tout son aura, devenu prévisible. Des titres répétitifs et peu engageants. Une forte impression de déjà vu, déjà fait, vont ressortir de «
Love and
Treat Me Right » et de « Tell Me How ». Ceux-ci s’annonçaient pourtant particulièrement aguicheurs. Ils passent très bien sur leur début, puis finiront par lasser à force de répétitions et de passages mis en boucle. De même que « My Evil Ways », lourd et tripant dans sa rythmique, avec une intonation de voix qui ne serait pas sans rappeler un certain
Robert Plant lors des débuts de l’ère Zeppelin. Mais cette voix sera étouffée par le jeu tonitruant des guitares. Chercherait-on ainsi à cacher les faiblesses de David Coverdale?
Allons à l’ombre et quittons avec parcimonie ce gros son, héritage du
Texas. Dans un ton plus tempéré et rock n’ blues, Coverdale reprendra sa place de leader. Mais on perçoit encore davantage ses limites. «
Love Will Set You Free » est un morceau séduisant et séducteur. Pas de prise de risque, les instruments ici se contenteront de suivre Coverdale sans discuter. Le refrain sonnerait néanmoins assez creux. Un chant poussif, constipé, si j’ose le mot, sur le titre qui sera surement celui le plus ébouriffant de l’album. Celui qui aurait pu devenir le plus réussi. Dans un hard abrasif à l’ancienne «
Dogs in the Street » nous saute aux oreilles. La rythmique se déchaîne dans une dynamique inattendue. Mais David Coverdale ne se montrera pas ici à la hauteur de la performance. Ce qui est bien dommage.
On oublierait presque les ballades, presque comme à chaque fois. Un blues/rock correct à l‘écoute de « Easier Said Than Done », même si le refrain aurait tendance à nous rappeler
Robbie Williams. Un country rock sans originalité sur «
One of These Days ». David toutefois se parera là de sa belle voix. Magique sur le refrain, mais ne parvenant pas à dissimuler quelques cassures au niveau des couplets. Un titre de près de 5 minutes qui se montrera lassant à force, et horriblement répétitif. Même registre acoustique et des émotions qui finiront par s’estomper (encore) au fil de l’écoute du banal « Fare the Well ». Inspiré et beaucoup plus long cette fois, le morceau éponyme «
Forevermore » figurera sur ces trois premières minutes comme une chanson émouvante au coin du feu. Ce passage charmant perdra de sa nature lorsque l’électricité des guitares se réveillera dans des semblants d’airs arabisants, complétés par des démonstrations de mélodicité qui n’auront d’autre effet que d’étouffer encore plus Coverdale. Des ambiances trop contrastées pour pouvoir devenir captivantes. Ce n’est pas le grand titre que l’on pouvait attendre de la part d’un éponyme.
Ce ne sera pas non plus le grand album que l’on pouvait attendre de la part de «
Whitesnake ». Pas mauvais, loin sans faut. Un album générateur de bonne ambiance. Ce sera à peu près ce que l‘on gardera de plus positif. «
Forevermore » aurait très bien pu être musicalement la dernière sortie de «
ZZ Top ». Les titres se veulent généralement inspirés du plus solide riffing southern. Très présent et terriblement efficace, en début de déroulement du disque seulement. Car pour le reste, on se maintiendrait trop souvent à des recettes maintes fois utilisées, qui perdront de leur saveur au fil de l‘écoute. Un album qui brillera par la quasi-absence des claviers et par un Coverdale éprouvant parfois des difficultés à délivrer son chant. «
Whitesnake » a vieilli.
13/20
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