Il y a des moments propices à l’écoute de
God Is an Astronaut. On peut y faire l’écoute pendant un moment de pensée obscure, s’atteler à la tâche en observant le monde tourner. Ou, pour ce qui est de mon cas, ce fut les deux conditions ci-dessus qui furent remplies pour me permettre d’écouter de façon optimale «
Age of the Fifth Sun ». Un sentiment de mélancolie profond pour mieux voyager dans les courants spatiaux de ce trio Irlandais.
Formé il y a maintenant dix ans par les frères Niels et Torsten Kinsella (respectivement guitare/basse et clavier/guitare) ainsi que Lloyd Hanney (batterie), voilà autant d’années que le groupe parvient à ramener de plus en plus de fans, avides de leur Post-Rock spatial et envoûtant, encore plus depuis l’incroyable « All Is Violent, All Is Bright ».
La légèreté côtoie la lourdeur, la douceur côtoie la puissance, le bonheur côtoie le malheur. Neuf titres, neuf parcelles d’émotions, de voyage. Là où d’autres groupes ont besoin d’une vingtaine de mains,
God Is an Astronaut parvient à transmettre de nombreuses sensations en trio, qu’elles soient auditives ou visuelles, si l’on prend en compte les concerts du groupe, magnifiquement porté par de nombreux ajouts d’images et de vidéos.
L’album, en soi, est très complexe à décrire. Le fait que le groupe a choisi depuis ses tout débuts de privilégier un art sans parole n’aide pas vraiment à saisir davantage le sens du voyage dans lequel les Irlandais désirent nous transporter.
God Is an Astronaut parvient à faire voyager dès les premiers accords de guitare de « Parallel Highway », le groupe lance une mélodie « basique », à la guitare idéalement soutenue par le duo batterie-basse sobre mais efficace, envoutante, très aérienne, relativement rapide… Tout à l’inverse de « Lost Kingdom ». Le sentiment de légèreté de « Parallel Highway » est ici remplacé par un sentiment un peu plus négatif, plus lent, plus posé. Un ensemble en quelque sorte plus lent, mais parsemé de lumière sur certains endroits, comme les breaks plus légers ou les changements de tempo sur la fin.
Si le groupe est capable d’envoyer des riffs de guitare plutôt aériens, il sait également envoyer des rythmes à l’agressivité plus ou moins contenue. C’est le cas pour « Shining Through ». Si la longue introduction privilégie des accords résonnants sur une batterie plus électronique, la suite du titre montera dans une progression sonore de plus en plus puissante et sourde, mais sans jamais renier les racines Post-Rock du trio. De l’autre côté, «
Age of the Fifth Sun » balance un ensemble de riffs plus rigides, plus mécaniques, sur une batterie gagnant de plus en plus en vitesse et se targuant même de ce qui semble être des frappes à la double-pédale sur la fin. Dans ce titre d’ailleurs, le groupe garde un schéma assez classique avec l’apparition d’un break très ambiant sur le milieu.
Évidemment, qui dit Post-Rock dit chanson à ambiance et (généralement) longue. Or
God Is an Astronaut ne réussit pas forcément à proposer des ambiances suffisamment accrocheuses sur ces plus longues compositions, qui ont tendances à trop s'étendre et à nous éteindre progressivement... Comme sur « Dark Rift » par exemple. Évidemment, les sonorités très étirées et les quelques notes de piano ont quelque chose de très mélancolique, mais le morceau met beaucoup trop de temps pour démarrer, l’oreille décroche bien vite pour le coup. Pour un piano bien plus prenant, vous pouvez plutôt jeter votre dévolu sur « Golden Sky » et ces arpèges splendides. Mélange de passages plus soudain et de courts moments d’accalmie, le duo piano-guitare est d’une beauté sans pareil. Et ce final …
Certains titres montrent toutefois de légers moments d’essoufflement…
God Is an Astronaut, à nous resservir une recette qui varie peu, a tendance à laisser certains titres nous endormir, comme c’est le cas avec « In the Distance Fading ». Le morceau a beau posséder, comme beaucoup d’autres, ces petits accords envoûtants, il n’en reste pas moins que le schéma commence peu à peu à lasser… Même remarque pour le morceau de conclusion « Paradise Remains » qui apporte certes un peu de décontraction, mais demeure très mal placé à la suite du splendide «
Age of the Fifth Sun ».
Mais globalement, ce sont les seules fausses notes de ce disque, introduit d’une manière épique par l’électronique vrombissante de « Worlds in Collision », celle-ci possédant quelque chose de presque chaud qui contraste d’une bien belle manière avec les discrets passages de guitares et le caractère presque gelé de ce piano de conclusion.
«
Age of the Fifth Sun » sera à juger selon le point de vue de l’auditeur. Certains seront tentés de pousser un peu pour dire que
God Is an Astronaut s’essouffle et propose une recette qui varie peu depuis l’immuable « All Is Violent, All Is Bright », d’autres diront simplement que les Irlandais font la musique qu’ils savent le mieux faire. Mais tous ne pourront contester la beauté du voyage dans lequel le trio continue de nous emmener année après année. Et pour encore longtemps, on l’espère.
Merci pour ton texte.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire